47 ème missive - Question de format !

19/03/2022

Cela dépasse à peine la taille d'un timbre-poste ou bien cela peut recouvrir entièrement une façade d'immeuble. Cri d'oisillon ou voie amplifiée par un haut-parleur. Tout est une question de format.

S'agissant de la photo on parle volontiers luminosité, contraste, composition, points forts, rapport longueur-largeur, mais rarement du format d'exposition. Pourtant lorsqu'une image est tendue comme une grand-voile au front d'un bâtiment, ça n'est plus une photo c'est devenu un paysage. Semblablement lorsqu'une galerie invite à voir des agrandissements de 9 mètres carrés, il suffit de trois ou quatre accrochages pour imposer au quidam le regard du photographe.

Deux cents photos tirées en 15 cm x 21 cm ne donneront jamais autant, qu'une demi-douzaine de panneaux géants. Mais attention le rapport s'inversera pour les passionnés qui se rendent dans quelque fondation pour admirer le travail d'un maître de la photo (1). Les temps de contemplation ne sont pas les mêmes, dans le premier cas on ne restera pas plus d'une demi-heure devant la démesure, tandis que dans le second c'est l'épuisement qui mettra un terme à la visite. Les photos intimistes de Claude Batho par exemple se prêteraient à cette lente procession, d'image en image, le nez collé dessus. C'est d'ailleurs tout aussi vrai pour Lee Miller, Jean Dieuzaide ou William Klein.

Quand l'image ne hurle pas alors il faut tendre l'oreille, mais rares sont ceux qui le font car aujourd'hui les gens préfèrent se couper la parole et ne rien écouter. Les chuchotements sont devenus des biens précieux.

Premier enseignement, il existe un lien entre le format d'exposition et le temps nécessaire pour regarder les œuvres. Second enseignement il en découle que plus le format est grand et plus l'information est sommaire.

Ces considérations sont-elles transposables au moment même de la prise de vue ?

« Si ta photo n'est pas bonne c'est que tu n'étais pas assez près » apostrophe bien connue de Robert Capa. Elle a cependant son contrepoint, un autre grand photographe dont je retrouverai peut être le nom affirmait au contraire que « si ta photo n'est pas bonne c'est que tu n'étais pas assez loin ». Les deux positions se défendent. Le conseil de Robert Capa invite à entrer de plain-pied dans la scène de prise de vue, de voir par conséquent en grand le sujet, d'en saisir les détails. Photographier de loin c'est à contrario montrer large, embrasser beaucoup et mal étreindre mais multiplier les sujets. C'est encore une question de format

Effondrement de façades d'immeubles, écrasement d'oiseaux, de l'Ukraine nous viennent des images abominables. Nous les ressentons, nous les voyons en grand quel que soit le format médiatique, c'est parce que nous sommes tout près.

(1) l'écriture baptisée « inclusive » est un d'usage à proscrire. Evitons les coups de canifs dans le flux naturel d'un texte et sachons ce que parler veut dire.

Ajouter un commentaire

Les commentaires sont vérifiés avant publication.
Nom Message
Pays
Ville
Email
Site web
Message